Le Glyphosate

Le Glyphosate

29 juin 2016 Non Par Me Gaston Vogel

Dans un texte sur le Brexit, j’avais écrit que les apparatchiks de Bruxelles baisent la babouche des lobbies qui sont en permanence aux aguets dans les couloirs du Berlaymont.

À la date de ce jour, nous en avons eu une nouvelle et lamentable illustration.

Résumons :

Le Glyphosate, pesticide fabriqué par le géant américain Monsanto, Bayer ou Syngenta voit son autorisation de commercialisation dans l’Union européenne expirer le 30.06.2016.

Il s’agit du désherbant le plus vendu au monde.

Nous savons que les représentants des gouvernements ont décidé de ne pas décider.

Faute d’une majorité qualifiée, le produit n’a pu obtenir l’autorisation à ce niveau.

Le blocage des Etats n’arrête cependant pas le processus.

La balle est sur ou plutôt sous la table de la Commission qui sera le joker qui débloque en définitive la partie.

Il est en effet de droit que si aucune majorité ne se dégage au niveau des Etats, la Commission peut décider seule.

Il faut savoir que le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) qui dépend de l’OMS, a classé le glyphosate parmi les substances « probablement cancérogènes ».

Il représente ainsi un danger réel pour la santé humaine alors qu’il est présent dans la majorité des boissons et nourritures (soja en particulier).

L’agence sanitaire européenne EFSA avait quant à elle, donné son feu vert, estimant que la substance ne posait pas de problème.

Elle a ainsi épousé la bien téméraire thèse défendue par Monsanto.

Ce qui n’est pas autrement étonnant si on sait que cette agence n’est pas à l’abri de conflits d’intérêts.

*

La Commission,  subissant tant la pression américaine que celle des principaux syndicats agricoles, a finalement opté le 28.06, pour une ré-autorisation pendant 18 mois, tout en confiant une ultime expertise à l’agence européenne des produits chimiques (ECHA).

Voilà une de ces détestables décisions qui préférant l’économie, le fric, les intérêts des lobbies Yankees et la paix des cultivateurs à la santé du citoyen, font que les gens du Berlaymont sont, comme je l’ai écrit l’autre jour, si répugnants et si irresponsables.

Ils n’ont, paraît-il pas connaissance, ou ne veulent pas se souvenir du principe de précaution qui veut que même si rien ne démontre l’exposition à un risque, son application est obligatoire dès l’instant où un risque incertain apparaît avec une certaine vraisemblance.

Le principe de précaution est apparu au cours des années 1980, à l’occasion de débats relatifs aux problèmes internationaux d’environnement, avant de recevoir une consécration publique en 1992, à l’occasion de la Conférence de Rio. La France est le premier pays à l’avoir inscrit dans son droit interne. La loi du 2 Février 1995, dite loi Barnier, en fournit une définition, insérée à l’article L.200-1 du code rural qui dispose que « l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement à un coût économiquement acceptable ».

Toutefois, le contenu de cet énoncé n’est pas exclusivement applicable aux questions d’environnement. Le principe de précaution d’ailleurs est de plus en plus souvent invoqué à l’occasion de problèmes relatifs à l’alimentation et à la santé.

(Le principe de précaution – Philippe Kourilsky, Geneviève Viney, p.11 – Editions Odile Jacob – Janvier 2000)

Il est de jurisprudence que l’absence de certitude, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles.

(Voir semaine juridique d. éd. gén. 14.09.2000, p. 41)

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En l’espèce, la Commission aurait dû refuser la ré-autorisation.

La décision prise par la Commission de laisser en vente libre un pesticide si potentiellement dangereux est monstrueuse et démontre que l’union européenne telle qu’elle fonctionne actuellement, ne mérite aucune confiance.

Cette décision, tout comme celle prise hier par la même Commission, d’écarter les parlements nationaux de la procédure d’approbation du CETA, démontre que l’Union européenne n’est en définitive qu’une zone euro-atlantique voire une zone euro-américaine.

Gaston VOGEL

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